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FRONTALE MONTREAL

2012-2013

 

Exposition réalisée en collaboration avec Cléo Tessier, urbaniste,

Soutien du Fonds d'Aide à l'Initiative Jeune (FAIJ) de Côte d'Or (21)

- Juin 2017 : Festival de l'Amitié, Berlancourt (60), dans le cadre de l'installation CANADAS

- Janvier 2017 : Le Camion, Association d'arts plastiques, Roubaix, dans le cadre de l'installation CANADAS

- Mai > Juillet 2013 : Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE) du Nord, Lille

- Novembre > Décembre 2013 : Espace culture de la bibliothèque Droit-Gestion de l'Université Lille 2

 

 

 

Une ville se lit davantage par ses coulisses, ces paysages habituellement mis de côté, que par n'importe lequel de ses symboles officiels. Dans la métropole québecoise, ces aspérités sont omniprésentes, au bord des axes majeurs ou des espaces structurants de l’hypercentre, jusqu'à devenir une spécificité malgré elle de l’urbanité montréalaise.

Écrasés sous la chaleur estivale, l’asphalte, les briques et le béton prennent un relief particulier. Entre friches et travaux, alternant façades aveugles et trouées béantes des voies urbaines, entre dynamisme culturel et résistances sociales d’autant plus palpables au lendemain du "Printemps Érable", c’est une ville contrastée qui s'expose, sans fard : une ville "en chantier".

 

 

Morphologie urbaine et discontinuités

 

Ville insulaire bordée par le fleuve Saint-Laurent, Montréal est percée d’axes majeurs (ponts, autoroutes, échangeurs) qui créent d'inévitables coupures tranchant net le paysage ; autant de cicatrices urbaines accentuées par l’échelle du continent nord-américain et l’orthogonalité typique de l’aménagement. Ce territoire dilaté et ses infrastructures monumentales génèrent alors nombre d'espaces intermédiaires, résiduels, infléchissant la lecture du paysage urbain.

 

Montréal est également une ville multipolaire, composée de quartiers aux dynamiques contrastées, soumise dans son ensemble à d’importantes opérations de requalification urbaine engagées par la municipalité. Entre ces espaces de reconversion subsistent des zones délaissées, sans fonctions définies, pourtant visibles en cœur de ville (dents creuses, terrains vagues, friches). Ces interstices deviennent des espaces ambigus, indéterminés, contrastant avec l’image de la ville planifiée et ordonnée.

 

 

Porosité et appropriation urbaine

 

Cette discontinuité urbaine, bien qu'incidente, est loin d’être "vide" ; elle se remplit de significations, par une multitude d’indices entrelaçant intérêts, enjeux et modes de vie. De la simple marque isolée au graffiti élaboré, de l'affichage sauvage à la saturation publicitaire, jusqu’aux jeux du mobilier urbain et des pratiques qui s'y greffent, ces signes font émerger une vitalité alternative qui concurrence les espaces publics institutionnalisés et renvoient, depuis les coulisses, l’image d’une ville plus informelle mais bouillonnante.

 

Cet investissement de l’espace en marge témoigne d’une urbanité en pleine mutation. Comme une résistance aux structures imposées, aux usages planifiés, aux lieux "autorisés", comme deux mondes glissant l'un sur l'autre, un besoin d’expression semble transparaître à travers ces traces sur les murs et dans les rues, laissant poindre le tempérament à fleur de peau d’une ville plurielle, en proie aux contradictions.

 

 

"Poreuse comme cette roche est l’architecture.

Édifices et actions s’enchevêtrent dans des cours, des arcades et des escaliers.

En tout on préserve la marge qui permet à ceux-ci de devenir le théâtre de nouvelles constellations imprévues.

On évite le définitif, la marque. Aucune situation n’apparaît telle qu’elle est, prévue pour durer toujours,

Aucune figure n’affirme : ainsi et pas autrement."

                                                                                                 Walter Benjamin

Film photographique - Exposition sonore

Aide au montage : Clément Parise et Patrice Théry (CAVUL Lille 3)

 

Piste Cyclable des Carrières

(Vidéo : 5'35)

 

Suivant l’évolution des villes qui furent transfigurées au cours du vingtième siècle par le développement automobile, Montréal connait aujourd’hui, dans un mouvement de reflux, la montée de modes alternatifs de déplacement, caractérisée notamment par l’usage du vélo.

Cette mobilité douce imprime progressivement sa marque sur l'aménagement : la municipalité aménage toujours plus de pistes cyclables, de nombreux ateliers spécialisés s’ouvrent, et le vélo devient un véritable outil de transformation urbaine. Cette pratique permet d’aborder la ville sous une autre échelle temporelle et spatiale, de découvrir certains quartiers par les coulisses, d’envisager les perspectives urbaines à taille humaine.

 

La piste cyclable des Carrières utilise l’espace réaménagé le long de la voie ferrée (Canadian Pacific Railway) et constitue un bon moyen de traverser la trame urbaine, en enjambant souvent les grandes avenues fréquentées. Elle longe également la Rue des Carrières, notable pour être une des rares rues sinueuses en dépit de la grille orthogonale de Montréal. Le trajet ici proposé permet de localiser différents points de vue et d’écoute, donnant ainsi un relief supplémentaire aux "aspérités" de Montréal, du gravier craquant sous les roues aux sifflements de l’asphalte.

Cette immersion donne à voir certains repères urbains bien connus des montréalais : des dessous du Viaduc Van Horne, entrée du Boulevard Rosemont - dont les abords sont bien connus des graffeurs et des explorateurs urbains - jusqu’à l’incinérateur des Carrières, véritable sextant pour la ville avec ses deux cheminées de 75 mètres de haut dominant les alentours.

 

Les contrastes de Montréal s’illustrent dans ses sonorités, ses textures denses et épaisses, souvent minérales, ou le grain de ses accents. Ils nous rappellent, au propre comme au figuré, la formule de Luc Lévesque : "Montréal stimule une énergie similaire à celle du chantier" (« Montréal, l’informe urbanité des terrains vagues. Pour une gestion créatrice du mobilier urbain », Annales de la recherche urbaine, n°85, déc. 1999, pp. 47-57).

 

 

Jardin Amérindien (Sentiers Urbains)

(Vidéo : 3')

 

Malgré sa forte minéralité, Montréal cultive un rapport étroit avec une certaine idée de "nature".

En plein centre se dresse bien entendu la colline du Mont-Royal, qui donne son nom à la ville. Comme nombre de métropoles d’Amérique du Nord, le tissu urbain ménage également de multiples parcs où se concentrent activités récréatives et festives, installations culturelles et sportives et évènements populaires, à l'instar du Parc Lafontaine ou du Parc Laurier.

 

Mais à une échelle plus fine, une multitude d’initiatives sont impulsées dans toute la métropole, visant à reverdir les quartiers, à améliorer le cadre de vie des habitants en leur donnant "accès à la nature", à embellir le paysage tout en favorisant le lien social. A ce titre, Montréal mise sur les expérimentations dans le domaine de l’écologie urbaine, comptant sur un réseau développé d’acteurs : écoquartiers, associations spécialisées et milieu communautaire, chercheurs, artistes… L’agriculture urbaine se développe ainsi sur les toits des universités et des bâtiments publics, la gestion des déchets et du compost s’organise à l’échelle du quartier, les jardins collectifs sont présents dans tous les arrondissements, des programmes locaux portés par les habitants verdissent les ruelles.

 

A titre d’exemple, l’organisme à but non lucratif "Sentiers Urbains" propose une démarche de "verdissement social" : des jardins thématiques, ouverts à tous, sont créés sur d’anciennes friches ou "dents creuses", accueillant régulièrement diverses actions de découverte et de sensibilisation et autres manifestations artistiques, et tentent d'offrir aux habitants et aux promeneurs une pause, un instant pour respirer et écouter, un rythme autre que celui de la ville.

Le Jardin des Cultures Amérindiennes est un des 8 jardins créés dans l’arrondissement Ville-Marie, en plein cœur de l’urbain montréalais. L’asphalte cède ici à la terre battue, le lierre investit les façades, le bruissement des feuilles se confond avec le bourdonnement du trafic, le chant des oiseaux dispute l’espace aux klaxons… Cette courte déambulation donne l’expérience d’une nature ponctuelle et émergente, mêlée à l’omniprésence d’une ville difficile à percer.

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Les différents paysages sonores du film photographique (et davantage) sont également en ligne sur la carte sonore de Montréal : Montréal Sound Map, carte contributive et évolutive qui permet l'archivage de sons typiques de la métropole.

* Montréal Sound Map est un projet de Max Stein et Julian Stein.

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